Le nom de Karl Lagerfeld est désormais associé à celui de l’Hôtel de Crillon, palace parisien qui lui a offert l’opportunité détendre son registre créatif. En effet, l’iconique couturier, passionné par les arts décoratifs et le XVIIIème siècle qu’il affectionne depuis toujours, a déposé sa talentueuse griffe dans deux suites admirablement décorées.
L’aventure a débuté par une lettre manuscrite adressée par Aline Asmar d’Amman, directrice artistique en charge de la rénovation de l’hôtel, au célèbre designer. «L’Hôtel de Crillon ferme ses portes pour travaux. Parce que sa rénovation se fait sous le signe de l’audace et des savoir-faire ; parce qu’il n’existe pas au monde une suite de palace signée Karl Lagerfeld ; parce que cette suite serait le parfait pied-à-terre parisien où design, art, mode, photo se télescopent en musique… Parce qu’il y a tant à faire et que vous êtes le seul qui puisse tout faire, je serai très honorée de vous rencontrer, à votre convenance, pour en discuter… ». Karl Lagerfeld est immédiatement séduit par cette proposition et décide de franchir le pas. Très vite, débute une collaboration de confiance entre le palace et le couturier qui accepte avec enthousiasme de mettre en scène le Nobile 2 au quatrième étage, une enfilade de suites ouvrant sur la place de la Concorde.
Le designer Lagerfeld voit grand, mais toujours dans l’élégance
Pour aménager ces «Grands Appartements», le créateur qui a l’habitude d’aller jusqu’au bout de ses passions, a livré un témoignage inédit de son amour des arts décoratifs français et du XVIIIème siècle, réinterprétant leurs codes en toute modernité. Il faut dire que Karl maîtrise à la perfection l’art de vivre à la française. Dans ces somptueuses chambres, on découvre de prime abord, toute l’ampleur de son intuition innée pour la décoration. Le designer Lagerfeld voit grand, mais toujours dans l’élégance. Pour réaliser, dans les règles de l’art, certains éléments exceptionnels, alliant innovation et créativité, il a souhaité faire appel à la compétence et au savoir-faire des plus grands artistes et artisans. Ainsi, Christophe Martin, peintre d’art, que le couturier associe souvent à ses projets personnels, a réalisé les peintures des murs et plafonds. Pour créer des effets de vibrations et de textures, l’artiste a posé jusqu’à neuf couches de peinture qu’il a ensuite griffé avec des peignes réalisés sur mesure.
Des tissus confectionnés comme au siècle des Lumières
Dans les salons, Karl s’est inspiré pour les tapis, de dessins de la Manufacture des Gobelins. La Maison Pinton a réinterprété les originaux en utilisant le même savoir-faire et en mêlant aux matériaux classiques, laine et soie, des matières inattendues comme le métal martelé. La Manufacture Royale Bonvallet d’Amiens, spécialisée dans le gaufrage depuis 1786, a extrait de ses archives les rouleaux utilisés pour décorer l’Opéra de Versailles lors du mariage de Marie-Antoinette et du Dauphin. Les tissus des baldaquins retissés sortent aussi des archives du XVIIIème et ont été confectionnés comme au siècle des Lumières par Bruno Pilet, un fidèle du designer. Les fenêtres ont été élégamment habillées de rideaux en taffetas de soie, évoquant le tombé d’une robe Haute couture, s’accordant et finalisant l’harmonie de chacune des pièces. Ces réalisations d’exception s’intègrent sans heurt dans l’ancien hôtel particulier de la famille de Crillon, sans vampiriser l’architecture mais au contraire en la soulignant.
Une chambre « Queen Choupette » dédiée à sa chatte star
Et, parce que Karl Lagerfeld aime surprendre, jouxtant les «Grands Appartements», se cache «Queen Choupette», une chambre baptisée du nom de sa chatte, qui a fêté le 15 août dernier ses cinq printemps. Contemporaine, en noir et blanc, c’est un hommage à sa célèbre et ravissante Sacré de Birmanie. Le couloir desservant la chambre tient lieu de galerie photos mêlant portraits de Choupette la star, clichés de Paris et Versailles pris par le designer et extraits de sa collection personnelle. Un baldaquin à rayures, des peintures griffées, des boiseries en marbre, des meubles en ardoise font écho aux toits que l’on aperçoit sur la cour, tandis qu’un bureau de collectionneur en papier mâché et bambou, réalisé en exclusivité, est dédié à la belle féline (www.rosewoodhotels.com).