C’est au Petit Palais, que Schiaparelli a présenté sa collection Haute Couture Printemps-Été. Pour ce défilé, Daniel Roseberry a été inspiré par l’Enfer, premier opus de La Divine Comédie de l’italien Dante Alighieri . Le créateur américain a imaginé des silhouettes spectaculaires avec notamment ,cousus à même les vêtements, des têtes d’animaux sauvages ultra-réalistes !
En 1308, le poète Dante Alighieri commence ce qui va devenir son chef-d’œuvre ultime, La Divine Comédie, un poème long de 14 233 vers divisé en trois livres : l’Enfer, le Purgatoire et le Paradis. «Nous connaissons tous cette œuvre, si ce n’est par cœur, au moins de nom. Et pourtant, lorsque je l’ai reparcourue récemment, j’ai été frappé par quelque chose qui m’avait échappé lorsque je l’ai découverte pour la première fois – non pas par l’horreur de l’enfer que Dante évoque si vivement, ni le sentiment de désespoir qui vous envahit alors que vous descendez de plus en loin dans les ténèbres – mais par la façon dont l’histoire est, à l’origine, une allégorie du doute. Le narrateur, le double de Dante (également nommé Dante), est d’âge mur au début du récit lorsqu’il se retrouve « à mi-chemin sur le voyage de notre vie. Et pourtant, alors qu’il s’enfonce plus profondément dans l’Enfer, il réalise à quel point il sait peu de choses – en dépit de toutes ces années d’expérience, toute cette vie, il demeure dans cette « forêt obscure », et le chemin qu’il avait autrefois parcouru si sûrement a disparu de sa vue » explique Daniel Roseberry. «Cette sensation m’étreint tout particulièrement quand je dessine. Ce qui m’a parlé dans l’Enfer, ce n’est pas seulement la théâtralité de la création de Dante, mais à quel point elle représente une métaphore parfaite pour le tourment que chaque artiste ou créateur éprouve lorsqu’il est face à son écran ou carnet de croquis ou devant une première toile, dans ce moment où nous sommes secoués par ce que nous ignorons» poursuit-il.
Le léopard, le lion et la louve représentent la luxure, la fierté et l’avarice
«Quand je suis bloqué, je me console souvent en pensant à Elsa Schiaparelli : les codes qu’elle a créés, les risques qu’elle a su prendre, sont désormais rentrés dans l’histoire, et pourtant, elle aussi a dû douter et avoir peur pendant qu’elle donnait vie à sa Maison de couture. Sa peur a nourri son courage, ce qui semble a priori contre-intuitif est en fait la clé du processus artistique. La peur signifie qu’on se pousse à créer quelque chose de surprenant, quelque chose de neuf.» Outre un clin d’œil au sens de l’organisation de Dante (trois looks pour chacun des neuf cercles de l’enfer), je me suis également directement inspiré de certaines de ses images les plus saisissantes. Le léopard, le lion et la louve – représentant respectivement la luxure, la fierté et l’avarice – s’incarnent ici dans de spectaculaires créations de fausse taxidermie, entièrement construites à la main, à partir de mousse, de résine et d’autres matériaux artificiels. D’autres pièces s’inspirent de la dimension insaisissable et trompeuse de son Enfer : les paillettes frémissantes de certaines des robes sont en fait fabriquées à partir de plaques d’étain de cuir lissé, et les boules de breloques qui recouvrent une jupe ne sont pas en tissu mais en perles de bois. Le chatoiement faussement irisé des robes colonnes en velours est en fait peint à la main, dans un pigment qui change de couleur selon votre point de vue, comme les ailes d’un papillon. En outre, des plastrons ont été sculptés en vagues de nacre véritable, et un autre en marqueterie de citronnier, et mon préféré, un buste géant en cuivre patiné à la main ont été des travaux façonnés avec amour au cours de ces quatre derniers mois» conclut le Directeur artistique. Un défilé audacieux pour ne pas dire détonant, mais qui ne laisse personne indifférent, à commencer par l’association PETA qui a réagi au scandale provoqué par les fausses têtes de félins réalistes utilisées comme accessoires de mode.